Le duo Yoann Richomme et Yann Eliès © Vincent Curutchet / Alea
Imoca
Édition 2023 24 octobre 2023 - 14h50

Yoann Richomme : "Je préfère le double au solitaire…"

… Un exercice qui ne déplait visiblement pas non plus à son compère Yann Eliès qui rempile pour une huitième Route du café après en avoir remporté trois (2013, 2017, 2019). Le brillant tandem cumule aussi cinq victoires dans la Solitaire du Figaro et autant dire qu’il fait partie des favoris à bord de Paprec Arkéa, l’un des deux plans Koch – Finot-Conq du plateau, mis à l’eau en février.
Ce sera la première transat de cet IMOCA bien né qui a pu dégourdir ses foils sur la Rolex Fastnet Race et le Défi Azimut Lorient Agglomération avec à la clef deux belles performances (2ème et 4ème).
Rencontre avec un binôme aussi complémentaire que complice.

Lorsqu’on approche du ponton, les yeux des curieux sont irrémédiablement tournés vers ces cockpits fermés, se demandant ce qui peut bien se tramer à l’intérieur. Sur l’IMOCA Paprec Arkéa, c’est l’heure des photos et des interviews. Petit chauffage d’appoint pour tempérer l’atmosphère, coussin sur le winch pour le confort de l’assise, on est reçu comme à la maison…

Vous êtes tous les deux des habitués de la Route du café, qu’est-ce qui vous plait tant dans cette course ? 

Yoann Richomme : Le double déjà, j’adore ce format, je le préfère au solitaire. Et le parcours a toujours été sympa : le Costa Rica, Le Brésil. Le plaisir aussi d’avoir vu un événement grandir au fil des éditions. Au départ, les vingt premières années, c’était timide mais depuis dix ans, la course a explosé. Imaginez, 95 bateaux cette année ! Ça nous promet une belle bagarre. Et puis l’accueil et le village sont top, le bassin s’y prête bien, le public est présent. C’est un beau moment.

Yann, tu rejoindrais en cas de victoire le club très fermé des quadruples lauréats de la Transat Jacques Vabre Normandie Le Havre. Tu y penses ?

Yann Eliès : Oui on l’a dans un coin de tête mais pour moi l’objectif reste d’accompagner Yoann dans son projet. Mon ambition personnelle passe en second.

Le nouvel IMOCA Paprec Arkéa © Vincent Curutchet / Alea
Le nouvel Imoca Paprec Arkéa © Vincent Curutchet / Alea

Justement Yoann pourquoi avoir choisi Yann ? 

Yoann : Je l’ai choisi pour son expérience des IMOCA. Il a un savoir-faire dans la manœuvre de ces bateaux que j’ai besoin d’acquérir. En plus, c’est un très bon régatier, qui a du succès sur cette course avec trois victoires, donc ça ne gâche rien ! En l’embarquant avec moi, l’idée, c’était de me caler techniquement avec mon bateau et d’être accompagné sportivement par quelqu’un qui pouvait me tirer vers le haut, être mon égal et devenir un bon binôme pour cette épreuve. Parfois ça se joue sur des détails infimes, c’est là où c’est intéressant d’avoir un profil de vainqueur de Transat Jacques Vabre avec soi.

Et toi Yann, pourquoi avoir rejoint le team Paprec Arkéa ?

Yann : Ce qui me plait c’est de faire partie d’un projet, d’une équipe qui s’est donnée pour mission de gagner le Vendée Globe. J’ai envie de laisser une petite trace même si je ne mène pas le projet jusqu’à la fin. En travaillant en sous-main et dans l’ombre, j’aimerais permettre au team de se donner les moyens de la victoire.

Vous semblez avoir trouvé votre rythme de croisière ensemble …

Yann : On est assez en symbiose. Yoann est plus cartésien alors que je fonctionne davantage au feeling. Ça c’est le décalage de générations ! Yoann va être plus porté sur l’utilisation des outils informatiques, pour obtenir des réponses par l’ordinateur quand moi je vais plus le faire à l’instinct. Yoann est aussi plus physique que moi !

Yoann : Je fais 92 kg quand même !

Yann : Mais moi j’ai l’expérience ! Bref, on est vraiment complémentaires.

Le duo Yoann Richomme et Yann Eliès © Vincent Curutchet / Alea
Le duo Yoann Richomme et Yann Eliès © Vincent Curutchet / Alea

Et au quotidien comment ça se passe, on partage les tâches comme dans un couple ? 

Yoann : Oui et non, disons qu’on vit en alternance. Chacun se prépare son repas, moi j’oublie même parfois de manger.

Yann : Ah moi jamais, je lui rappellerai !

Yoann : Oui enfin ça ne dure pas plus de deux jours, j’aime aussi manger. Par contre, on a opté pour une stratégie de sommeil radicalement différente des autres. On ne met pas de réveil, on se laisse la possibilité à l’autre de dormir plusieurs heures d’affilée. Par exemple, quand je suis de quart, tant que je reste alerte et performant, je laisse Yann dormir. Ça peut aller de 30 min à 4 ou 5 heures. Dès que je sens une infime baisse de régime, je vais réveiller Yann et inversement. C’est la personne de quart qui donne le tempo.

Yann : C’est un vrai plus car quand on se réveille naturellement, on n’est pas groggy, on est tout de suite opérationnel. C’est un vrai confort.

Le sommeil, c’est dans la bannette, mais j’imagine que vous passez aussi beaucoup de temps en veille dans ce cockpit panoramique, un des atouts de ce bateau…

Yoann : Mon endroit préféré, c’est là, juste à côté du piano, ce siège baquet, super confortable, amorti comme pour un VTT, où je peux tout voir : les voiles, les foils, l’écran de navigation… C’est un des atouts par rapport aux cockpits plus fermés. Il y a aussi la coque qui a été pensée et dessinée pour mieux passer dans les vagues. Elle est moins tendue que celle des plans 2020 et ça devrait nous permettre de mieux passer dans la grosse mer.

Yann : Il y a encore des réglages à faire bien sûr, des choses à tester mais cette transatlantique va nous aider à affiner tout ça, dans les différentes conditions météo et de mer qu’on va rencontrer.

Quel est votre meilleur ou pire souvenir sur la Transat Jacques Vabre Normandie Le Havre ? 

Yoann : Moi ça reste l’édition 2019 avec Damien Seguin. On était sur un bateau à dérives, il y avait déjà des IMOCA à grands foils. Notre début de course était hyper engagé, dans des conditions ventées. Au bout de 24h, on était encore avec les foilers dans le milieu du golfe de Gascogne, c’était un beau moment de compétition. On avait bien géré notre partition, nos choix de voile, de changement d’allure. Après on a été beaucoup moins inspiré ! Quelques erreurs de trajectoires, une météo horrible avec plusieurs fronts qui se sont succédés, nous obligeant à descendre toute la côte marocaine pour finir aux Canaries et un Pot-au-noir cauchemardesque.

Yann : C’est vrai que ça avait été un Pot-au-noir assez cruel de mémoire, pas que pour eux, il reste dans les annales celui-là. Souvenez-vous Charal qui s’était fait enfermer. (laissant passer Apivia sur lequel Yann l’emportait aux côtés de Charlie Dalin NDR).

Yoann : On s’était quand même fait doubler par des mecs qui avaient 300 milles de retard...

Et la destination Martinique, qu’est-ce que ça vous inspire ? 

Yann : Le soleil, le vent, une baie magnifique et le rhum bien sûr

Yoann : Je n’étais pas là lors de la précédente édition, j’ai hâte de découvrir !

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